Les coulisses de la reproduction
Les articles sur la reproduction, mis à la disposition des débutants pour expliquer le déroulement d’une portée de A à Z abondent sur les forums et groupes, Facebook, voire sur les sites de certaines rateries. Vous y trouverez toutes les questions techniques. En revanche, les Ratouphiles Associés vous proposent de découvrir d’autres facettes de la reproduction en vous entraînant dans les coulisses d’une portée vue du côté de l’éleveur avec toutes les réflexions qui s’imposent lorsque l’on souhaite se lancer dans l’aventure.
Reproduire ou ne pas reproduire, telle est la question
Plusieurs motivations poussent les ratouphiles à faire reproduire leurs rats. La dimension affective est très souvent le déclencheur de leur démarche car la reproduction leur permet de conserver un petit bout de leurs rats de coeur au fil des générations. Mais s’arrêter à ce seul objectif est déconseillé.
À cette dimension sentimentale s’ajoutent d’autres objectifs :
▶ travailler le caractère pour avoir des rats de compagnie bien dans leurs pattes, correctement sevrés et sociabilisés, proches de leur maître,
▶ viser une amélioration (ou tout du moins éviter de dégrader) de la santé de nos compagnons pour allonger leur espérance de vie et diminuer leurs soucis de santé, enfin,
▶ conserver et faire ressortir des types physiques particuliers pour garder une diversité.
Une raterie vise très souvent ces 3 objectifs et oriente ses choix en fonction des différents paramètres qu’elle essaie de maîtriser via la sélection.
Mais la reproduction est loin d’être un long fleuve tranquille et le rat se révèle être finalement une espèce délicate à élever. Génétiquement, les rats sont prédisposés à certains soucis de santé (respiratoires et tumoraux notamment), ce qui rend l’éradication de ces problèmes assez illusoire même avec la meilleure méthode de sélection possible. L’espérance de vie peut être un peu rallongée mais la reproduction est imprévisible, tout comme ses résultats.
S’ajoutent les problèmes ponctuels et les coups durs liés à la reproduction voire la perte de la maman et/ou de ses petits.
Faire reproduire sa rate est donc une responsabilité à ne pas prendre à la légère car sa santé est mise en jeu.
Aussi, parfois, il peut être judicieux voire salutaire de ne pas faire reproduire un rat. Les raisons de ce renoncement peuvent être nombreuses : état de santé du rat ou de sa famille insatisfaisant, caractère agressif ou trop hormoné etc.
On peut également faire le choix de ne pas reproduire ses rats pour des questions éthiques : les refuges sont remplis d’animaux abandonnés qui attendent une nouvelle famille.
Certains peuvent aussi ne pas vouloir faire reproduire leurs rats à cause de toutes les implications inhérentes à une reproduction : longues recherches et réflexions en amont sur les familles et le reproducteur idéal, gestion de la portée avec tout le stress et les responsabilités qui vont avec, temps et énergie passés à sélectionner de bons adoptants et à s’occuper de la mise à jour des suivis, gestion d’un site internet etc. De plus la reproduction peut impliquer d’avoir une troupe conséquente voire un groupe de chaque sexe (avec des cages et des sorties séparées) entraînant un surcroit de temps, d’énergie et d’argent.
En résumé, la reproduction requiert une réflexion solide en amont et une motivation à toute épreuve !
L’importance de la sélection et les problèmes liés à l’absence de sélection
Si l’on veut obtenir des résultats positifs, il faut partir d’une bonne base. La communauté ratouphile dispose actuellement d’un cheptel assez conséquent pour qu’il soit inutile de démarrer de zéro avec des rats de provenance inconnue. Il est fortement conseillé de se lancer à partir de familles déjà existantes, connues et bien suivies. Des apports extérieurs, notamment étrangers, peuvent bien sûr être envisagés mais doivent se faire autant que possible à partir de familles ou de lignées déjà bien travaillées afin d’éviter notamment l’introduction du mégacôlon. L’apport de rats d’animalerie ou de provenance inconnue est inutile et contre-productive dans une démarche de sélection car en l’absence de données, il est impossible de savoir à quoi s’attendre.
La sélection est la clef de voûte de tout projet reproductif, c’est elle qui permet d’espérer maintenir ou améliorer ses résultats.
La sélection commence par le choix des deux reproducteurs en fonction de critères qui ont été affinés par des années d’expérience et de recherches des éleveurs : l’âge, le poids, le caractère et l’état de santé. Mais pour qu’elle soit efficace, la sélection ne doit pas se limiter aux deux seuls parents. En effet, c’est toute une recherche horizontale et verticale de la généalogie de chaque rat qui doit être effectuée afin d’éviter de mélanger deux individus qui auraient les mêmes prédispositions génétiques à certains soucis de santé ou de caractère (beaucoup de tumeurs ou de soucis respiratoires des deux côtés par exemple) afin de ne pas accentuer et fixer ces problèmes. Il s’agit donc à ce stade de compenser les défauts d’un côté par des qualités complémentaires de l’autre étant donné qu’aucune famille n’est parfaite et exempte de tout souci.
Ensuite, à partir de cette base de recherche et du choix des reproducteurs, il est possible d’opter pour plusieurs méthodes de sélection,voire de les combiner ou de les alterner.
Les besoins matériels
La reproduction nécessite un investissement matériel et financier supplémentaire. Une cage de maternité ainsi qu’une cage d’éveil sont à prévoir ainsi qu’une cage de quarantaine pour accueillir le futur reproducteur s’il n’est pas déjà sur place (et dans ce cas, des frais de covoiturage peuvent s’ajouter). Des jeux adaptés aux ratons doivent être prévus pour participer à leur sociabilisation ainsi que l’ajout de hamac pour prévenir d’éventuelles chutes. Il est également possible d’investir dans un parc à raton pour sécuriser les sorties.
Il faut aussi prévoir une hausse importante (de l’ordre de 30 % environ) de la consommation de litière et de nourriture tout au long de la portée.
Des frais vétérinaires liés à la reproduction peuvent s’ajouter et il est indispensable de s’assurer avant de lancer sa portée que son vétérinaire pourra effectuer une césarienne en urgence.
Financièrement parlant, le prix des ratons couvre rarement l’intégralité des frais liés à la portée. Pour l’éleveur, la reproduction représente au mieux un équilibre dans ses dépenses mais le plus souvent un surcoût et non un bénéfice.
Il faut aussi avoir à l’esprit qu’en cas d’échec de la portée, tous les frais avancés pour la portée seront à la seule charge de l’éleveur.
L’investissement personnel durant une portée et le sevrage
L’investissement personnel se calcule en frais matériels supplémentaires mais toute une partie est invisible aux yeux des adoptants. La reproduction réfléchie et voulue nécessite un investissement en temps considérable. Avant la portée, la recherche du reproducteur occupe déjà un budget temps important et commence souvent au moins une année en avance car il faut analyser les problèmes de santé des deux familles qui seront mariées et choisir les candidats les plus compatibles. Il est judicieux de prévoir un ou plusieurs plans B car certains mariages se révèlent impossibles. Enfin, lorsque la date des saillies approchera, il faudra organiser les covoiturages aller et retour du prétendant.
Ensuite pendant la portée, l’éleveur doit être très disponible auprès de ses rats et de ses futurs adoptants. La sociabilisation est la partie la plus appréciée mais il ne faut pas oublier les à-côtés « administratifs » très chronophages : sélection des futurs adoptants, mises à jour des différents supports choisis, publications sur les forums et les réseaux sociaux, préparation du kit adoptant s’il y en a un, séances photos régulières (investissement dans du matériel), tri des photos et mise en ligne etc.
Le rôle de l’éleveur est primordial dans la sociabilisation des ratons depuis leur naissance jusqu’à leur départ dans leur nouvelle famille. Ces manipulations quotidiennes sont indispensables. L’éleveur veille à enrichir l’environnement des ratons tout au long de leur croissance afin de les rendre plus confiants et moins stressés par la nouveauté (voir l’article des Ratouphiles Associés dans l’Écho des Sputniks n°1 à ce sujet). L’âge d’adoption a d’ailleurs également évolué ces dernières années et s’est allongé. Actuellement, les rateries font partir leurs ratons vers 6-7- voire 8 semaines (contre souvent 5 semaines auparavant) pour parfaire la sociabilisation des petits.
Enfin, le sevrage, quant à lui se déroule en 2 parties. La première est effectuée naturellement par la mère et la deuxième concerne les mâles qui sont séparés des femelles pour être éduqués par d’autres mâles adultes. Il faut séparer les petits mâles de leurs soeurs lors de l’ouverture vaginale de celles-ci (voir notre numéro 1 à ce sujet). Mettre les ratons avec des adultes est indispensable à leur bon développement et à l’acquisition des codes sociaux. Cette phase d’apprentissage prépare les intégrations futures.
Une évolution des pratiques et des méthodes
Depuis les premières rateries au début des années 2000, les pratiques ont évolué en fonction des connaissances des éleveurs et de leurs retours d’expérience.
Tout d’abord, la constitution progressive d’un cheptel de rats de rateries a permis de travailler en diminuant les introductions de rats d’animalerie et d’origines inconnues.
Grâce à une meilleure connaissance des familles, les droits de reproduction ont pu être assouplis et l’âge moyen des mâles à la saillie a pu être diminué de 18-24 mois à 12 mois, augmentant ainsi les chances d’une fécondation réussie.
Avec le recours à des plans cycliques élaborés sur plusieurs générations en circuit plus ou moins fermé, il est devenu plus facile de s’organiser sur le long terme et donc de s’associer avec d’autres partenaires : ponctuellement, pour une seule portée avec une autre raterie ou un adoptant ou sur plusieurs générations entre plusieurs rateries autour d’un projet commun. La première option permet à des adoptants de s’impliquer dans un projet et de vivre l’expérience de la reproduction sous toutes ses facettes mais également de soulager l’éleveur en partageant certaines tâches avec lui (gestion des forums, réseaux sociaux…). Cela peut être un premier pas vers l’élaboration de sa propre raterie. N’hésitez pas à contacter les rateries pour leur présenter votre projet et vos envies.
Sans compter qu’en cas de coup dur, les rateries associées pourront s’épauler et s’entraider. Cette dimension psychologique n’est pas à sous-estimer car elle maximise les chances des rateries de tenir dans la durée malgré les coups durs et de se relever sans abandonner après un échec.
▶ En conclusion, faire naître une portée c’est beaucoup de bonheur : retrouver des petits bouts de nos rats dans leurs descendants, s’émerveiller chaque jour devant le développement rapide de nos ratons et participer à leur éveil. Ce sont aussi beaucoup de séances de câlins durant lesquelles les premiers liens entre les rats et nous se tissent… C’est enfin le plaisir de vivre une véritable aventure humaine qui peut être l’occasion de rencontrer des personnes formidables (adoptants, éleveurs…) et de lier de vraies amitiés. Et puis même si c’est toujours dur de voir nos ratons quitter définitivement le nid, il y a cette joie de les voir attendus, aimés et choyés dans leur nouvelle famille…
Cependant, comme nous l’avons vu, il est indispensable de se documenter correctement avant de se lancer dans cette aventure.
La première partie de la démarche consiste à engranger un grand nombre de connaissances à travers des lectures variées afin de bien maîtriser le sujet. Il s’agit non seulement de connaître tout le déroulé d’une portée mais aussi d’intégrer les notions de base en biologie, notamment en génétique (maladies, couleurs).
La seconde étape vise à élaborer son propre projet et à pousser sa réflexion en se posant toutes les questions qui découlent de la reproduction. À ce stade, on doit être capable de faire des choix et de savoir pourquoi on les fait.
Et la dernière étape consiste à évaluer les risques qui découlent d’une portée et se demander si on sera prêt financièrement, matériellement et mentalement à assumer tout ce qui peut arriver lorsque l’on se lance dans la reproduction.
La communauté ratouphile dispose de suffisamment de connaissances et d’expérience afin de vous soutenir et vous guider dans votre projet donc n’hésitez pas à la rejoindre pour débuter bien entouré…
Les portées des Ratouphiles Associés 2017
▶ 27 portées
▶ 315 ratons nés → 293 ratons vivants (93% de survie)
▶ Moyenne par portée : 11,7 ratons
Texte & photos : Les Ratouphiles Associés.