Enquête sur les complications gestationnelles
Les échecs de portées et complications gestationnelles sont la hantise de tous les éleveurs. Les ouvrages à usage vétérinaire ou pour les laboratoires n’abordent quasiment pas la question des complications gestationnelles et c’est donc pour faire face à ce vide que nous avons voulu enquêter sur la situation chez nos rats de compagnie.
Bien sûr ce sont ces difficultés qui marquent les esprits et l’enjeu de cette enquête est donc de regarder les chiffres pour vérifier si les impressions d’éleveurs se vérifient ou non statistiquement.
Dans les idées reçues ou pratiques, on a tout d’abord l’âge comme facteur aggravant des complications gestationnelles. Ce pourquoi la fenêtre de reproduction de nos rates est aussi courte (entre 5 et 9 mois).
Devant ces complications, pour les expliquer et les éviter, les éleveurs peuvent se poser plusieurs questions : est-ce que l’âge de la femelle, du mâle ou des deux est bien la cause des échecs de portées ou de complications gestationnelles après des saillies fécondantes ? Est-ce que forcer le « destin », la « nature » en multipliant les tentatives de saillies serait contre productif voire dangereux et source de complications futures ? Comment faire évoluer ses pratiques : jouer sur l’âge des futurs parents ? Changer de partenaires plutôt que de refaire une nouvelle tentative de saillies et garder plusieurs reproducteurs à la maison ?
11 rateries ont accepté de répondre à notre enquête pour nous aider à répondre à ces interrogations. Ces 11 rateries comptabilisent au total 166 portées ou tentatives de portées. Les portées réussies après une seule tentative de saillies, dites « One shot » 70,5 % de leurs portées ont été réussies (c’està- dire qu’il y a bien eu naissance de ratons) dès la première tentative de saillies et sans aucune complication pendant la gestation ou la mise bas. Ce sont donc des portées qui se déroulent parfaitement, des « One shot » comme on les appelle dans le langage des rateries. L’âge moyen des femelles ayant une portée après une seule tentative de saillies est de 6,5 mois tandis que l’âge de leurs mâles est de 15,5 mois.
Les portées réussies après deux ou tentatives de saillies
7,2 % des portées sont obtenues après minimum deux tentatives et maximum 3 tentatives de saillies, avec une moyenne de 2,1 tentatives.
L’âge moyen des femelles qui mettent leur portée au monde sans complications est de 6,9 mois. Cette moyenne un peu plus élevée que celles des « One shot » s’explique par la durée des pseudo gestations et le retour de chaleurs.
L’âge moyen des mâles baisse légèrement pour atteindre 15,4 mois. Cette légère baisse s’explique par le changement de mâles après un ou plusieurs échecs, parfois en faveur d’un plus jeune. En effet, pour un tiers de ces portées, un changement de mâle a été effectué.
Si on comptabilise ces deux catégories de portées réussies après une ou plusieurs tentatives, avec ou sans changement de mâles, c’est 77,7 % des portées lancées qui aboutissent !
Les portées avec des complications gestationnelles
Les complications gestationnelles représentent 10,8 % des portées. Les femelles se retrouvent gestantes au bout de 1,5 tentatives en moyenne et ont 7,2 mois en moyenne, tandis que les pères sont âgés de 16 mois en moyenne.
Contrairement à l’idée reçue, « plus on force les choses en multipliant les tentatives, plus il y a de chances que ça se finisse mal », 66,6 % des portées avec une complication pendant la gestation ou mise bas sont pourtant des « One shot » avec des femelles assez jeunes, âgées de 7 mois en moyenne (et 15,7 mois pour leurs mâles). 16,7 % des complications gestationnelles arrivent après 2 tentatives de saillies chez des femelles de 7,6 mois (et 16,3 mois pour leurs mâles), 11,1 % après 3 tentatives chez des femelles de 7 mois (et 15,5 mois pour leurs mâles) et 5,5 % après 4 tentatives chez une femelle de 9 mois (et son mâle de 19 mois).
Les causes de complications conduisant à une fausse couche, un dépassement de terme, une césarienne, etc. sont variées : infection pendant la gestation, foetus trop gros et/ou malformés, foetus décédés in utero, nombre trop faible outr op conséquent de ratons, etc.
Parmi ces complications gestationnelles, la perte de la maman est survenue malheureusement une fois à 7 mois, soit 5,5 % de ces portées.
Dans le LORD (Livre des Origines du Rat Domestique), 100 rates sont enregistrées comme décédées de complications de gestation (au 13/12/2020) sur 5530 portées enregistrées. Soit un taux de décès péri-partum de 1,8%.
Attention il ne s’agit que des décès, or, heureusement, les complications ne se soldent pas toujours par le décès de la mère. En enlevant
les dates aberrantes, on obtient pour ces rates un âge moyen au décès (donc, à la mise-bas à quelques jours près) de 279 jours c’est-à-dire
un peu plus de 9 mois.
Draka après une césarienne chez d’Ombre et de Lumière et Galaxy inconsciente pendant une mise bas difficilechez les Ikérats.
Les échecs (saillies non fécondantes)
En revanche, les échecs (saillies non fécondantes) représentent 11,4 % des tentatives de portées lancées par les rateries.
L’âge moyen des femelles est plus élevé : 7,5 mois avec 1,5 tentatives lancées. Le taux de tentatives est plus bas que pour le groupe avec plusieurs saillies réussies car certaines femelles sont déjà âgées. Pour ces dernières, il n’y aura qu’un seul essai. Les mâles sont également plus âgés, 17,6 mois en moyenne.
Pour ce groupe, l’âge plus élevé des femelles lors des premières tentatives de saillies semble être un facteur explicatif des échecs. Dans quelques cas, c’est l’âge ou la santé du mâle qui est responsable de l’échec puisqu’un changement de mâle aboutit à une portée.
Pour conclure, les recommandations d’un âge précoce de reproduction des femelles sont toujours pertinentes. En revanche, faire plusieurs tentatives de saillies, avec potentiellement un changement de mâle n’augmente pas le risque de complications futures, si l’âge de la femelle reste jeune. Les complications gestationnelles ont des causes variées qui ne sont pas complètement corrélées à l’âge ou encore au nombre de tentatives de saillies. Pour limiter la gravité de leurs conséquences, le suivi de la courbe de poids, la datation de la saillie ou encore la visite chez le.a vétérinaire au début du dépassement de terme à J24 restent des interventions efficaces qui permettent très souvent de sauver la vie de la maman. Ainsi, la survie de la mère dépend beaucoup de la réactivité de l’éleveur.
Les complications gestationnelles peuvent arriver sur de jeunes rates avec un début de gestation normal. Le terrain familial pourrait être un facteur explicatif mais il faudrait mener une autre enquête !
Si la question vous a intéressé mais que vous n’avez pas eu le temps de répondre à l’enquête, n’hésitez pas à envoyer un mp sur SRFA à Tani.
Les Ratouphiles Associés pourront relancer ultérieurement une nouvelle enquête plus large et plus précise avec de nouvelles données.
En attendant, nous remercions celles et ceux qui ont eu la gentillesse de répondre à notre questionnaire.
Texte : Les Ratouphiles Associés, Artefact. Photos : Les Ratouphiles Associés.